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12 juillet 2011

Les mémoires de la Seconde Guerre mondiale (3/3)

III – La fin des amnésies et des mythes depuis la fin des années 60


La mise en question du résistancialisme et de l’attitude de Vichy survient à la fin des années 60 : c'est le dégel des mémoires. Le documentaire Le Chagrin et la Pitié (1971) dénonce la collaboration de l’Etat français. Son affiche montre l’Assemblée nationale recouverte de slogans allemands, des passants lisant une interdiction faite aux Juifs d’assister à un spectacle ou encore un bureau de recrutement de la Légion des Volontaires français. Par conséquent, l’image d’une France unanimement et précocement résistante est mise à mal. Les événements passés ne peuvent être changés, l'Histoire serait donc statique pourtant ici le rôle de Vichy est revu et corrigé par l’Histoire et les recherches scientifiques et universitaires.


Marcel Ophüls, Le chagrin et la pitié, 1971.

Une mémoire juive émerge. Sur un plan personnel, les déportés vieillissent et racontent pour laisser une preuve du génocide (afin de contrer le négationnisme). Sur un plan historique, le dégel des mémoires dans les années 70 favorise la prise en compte des témoignages. Dans les années 90, des récits demeurés confidentiels sont réédités car désormais il existe une demande de la part de l’opinion publique.
Simone Veil écrit dans les Annales un article "Réflexions d'un témoin" dans lequel elle décrit le décalage entre ce silence des victimes juives et la parole libérée des résistants sortis des camps. Elle prend l'exemple de sa famille, seule la sœur résistante a pu s'exprimer dés la libération. Sur son autre sœur et elle-même, elle précise : "nous n'étions que des victimes, non des héros. Peu importe ce que nous avions vécu".
Shoah de Claude Lanzmann constitue une œuvre radicalement nouvelle pour illustrer cette mémoire. Annette Wieviorka dit que ce film consacre "l'ère du témoin".


Claude Lanzmann, Shoah, 1985.

Progressivement, la France se trouve face à son rôle dans la mise en œuvre de la « solution finale ». L'Historien américain Paxton, dans son bouquin sorti en 1973, La France de Vichy, montre clairement que la Révolution nationale et la collaboration ont été des initiatives françaises. Ce livre engendre des débats mais aussi la réécriture des manuels scolaires sur le sujet.
Les différents procès (Barbie puis Touvier, Papon) jouent un rôle essentiel concernant la sensibilisation de l’opinion au rôle réel de Vichy. Dans les années 90, ils médiatisent et sensibilisent l’opinion publique à propos du génocide juif. D’un côté la justice qui est faite pour réparer les dommages aux victimes n’est pas habilitée à dire l’Histoire. D’un autre côté, la justice doit juger les hommes et le passé au nom des victimes et des générations futures. Son rôle moral et politique est considéré comme étant supérieur à la recherche de la vérité par l’histoire.
Le mea culpa récent de la République intervient lors du discours de Jacques Chirac, le 16 juillet 1995. Pour le Président de la République, la reconnaissance est indispensable au nom des victimes mais aussi pour faire barrage aux thèses antisémites qui connaissent un regain en France dans les années 90. Elle marque ainsi un renouveau de la défense des droits de l’homme.

Le cinéma à travers des films comme Monsieur Batignolles sorti en 2001 (on ne dissimule plus les collaborateurs qui désormais font partie de l'histoire de la France) ou La rafle témoignent des mémoires de la Seconde Guerre mondiale en France et de son évolution. Quelques difficultés à montrer notre histoire demeurent à travers ce film salué par la critique et quelques grands Historiens comme Max Gallo. Annette Wievorka, une historienne du génocide juif, explique malgré tout quelques une de ses réticences :
"C’est pourtant la seconde partie qui est la plus contestable, et notamment la reconstitution du camp de Beaune-la-Rolande, infiniment plus facile à réaliser pourtant que celle du Vél d’Hiv. Le camp est installé pour les besoins du film en pleine forêt, sans la moindre habitation aux alentours, alors qu’il faisait corps avec le village. Curieusement, alors que le rôle de la police parisienne aidée par des miliciens est bien montré, les gendarmes sont pratiquement épargnés. La dramatique séparation des mères et des enfants est dans le film réalisée avec brutalité par les Allemands."
dans un article publié dans Libération du 15 mars 2010 (voir le lien : http://next.liberation.fr).
Dans les années 70, le souvenir refoulé du régime de Vichy (collaboration avec les Nazis et politique antisémite) ressurgit en raison de la prise de conscience mondiale du génocide juif  mais aussi de la renaissance de courant politiques xénophobes.
Le mythe résistancialiste s’effondre dans les années 1970.
La relecture du passé, souvent douloureux, est rendue nécessaire par le réveil de la mémoire juive. Les responsabilités du régime de vichy dans la mise en œuvre de la solution finale sont démontrées et réévaluées, ce qui amène les autorités françaises à reconnaître officiellement « la faute collective » commise au nom de l’Etat français.


Pour élargir notre sujet, il convient de dire que le cinéma a contribué à nous donner une idée de la résistance allemande, longtemps niée. Tous les Allemands n'étaient donc pas nazis (voir la rose blanche et le film Sophie Scholl).



Bande-annonce de  La Rafle. Un film réalisé par Rose Bosch sorti en 2009.


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